LITURGIE du DIMANCHE
commentaire sur la Parole

La bonne terre
le 13 juillet 2014
- 15e Dimanche du Temps Ordinaire

Lectures bibliques

Is 55,10-11
Psaume 64

Tu visites la terre, Seigneur,
tu bénis ses semences.


Rm 8,18-23
Mt 13,1-23


Le thème de ce 15e dimanche du Temps ordinaire, c’est la parole de Dieu. Une Parole efficace et féconde (cf. première lecture) mais qui a besoin, en même temps, d’une terre où produire son fruit (cf. Évangile).

La parole sortie de la bouche de Dieu

Le récit de la première lecture est la conclusion du Livre de la consolation d’Isaïe. Nous pouvons fixer le contenu de ce livre entre 553 av. J.-C., année où Cyrus, roi de Perse, accomplit ses campagnes victorieuses, et 539 apr. J.-C., date de la capitulation de Babylone. Le peuple d’Israël est donc en exil. Même s’il est tragique, cet aspect a des volets positifs : on ne rencontre plus Dieu dans le Temple mais dans sa Parole. Et la deuxième partie du livre d’Isaïe nous offre une théologie profonde de la parole de Dieu. La Parole est d’abord incarnée dans l’histoire : elle crée (cf. Is 40), interprète (cf. Is 48, interpelle (cf. Is 44,22), transforme (cf. Is 40,7-8), est efficace (cf. Is 55,11) et elle est différente de celle de l’homme (cf. Is 55,8). C’est une Parole qui promet un nouveau retour et qui ouvre un chemin de salut. Mais sous le choc de l’esclavage, des doutes surgissent dans le peuple de Dieu : ces oracles magnifiques, ces promesses extraordinaires ne sont-ils pas des utopies? Isaïe répond que le salut n’est ni automatique ni magique. Dieu vient, mais il faut aussi abandonner nos fausses routes. Par conséquent, il faut chercher le Seigneur (cf. Is 55,6s). Mais ça ne suffit pas, il faut également faire confiance à la parole du Seigneur, comparée à la pluie qui semble disparaître dans la terre mais qui, en réalité, la féconde en donnant la semence au semeur et le pain à celui qui a faim. Un dernier aspect. La parole de Dieu ne vient pas du prophète et encore moins d’un homme mais de Dieu. Son efficacité est donc dans les mains de Dieu et pas dans les prévisions et dans les attentes de l’homme. Il faut accueillir cette efficacité, mais avant, il faut reconnaître qu’elle est vivante et agissante dans l’histoire. Donc, avec Dieu, on ne peut ni projeter ni prétendre, mais attendre et collaborer.

La parole semée

Le récit évangélique de la parole de Dieu d’aujourd’hui insiste sur l’efficacité de la parole de Dieu et sur la nécessité de savoir l’accueillir. Matthieu compare la Parole à des grains, et comme nous le savons, la semence a ses temps de croissance jusqu’au fruit mûr. La Parole est efficace et elle germe dans les sillons de l’histoire, silencieusement. Contrairement à la parole de l’homme qui projette d’abord, définit les temps, les moments et les modalités d’opération. Mais allons au texte évangélique. Nous pouvons diviser le texte de Matthieu en trois moments : v. 3-9, la parabole du semeur; v. 10-17, le but des paraboles; v. 18-23, l’explication de la parabole du semeur.

«Le semeur sortit»

Si nous observons le semeur qui sort pour semer, une question surgit spontanément : « Pourquoi tout ce gaspillage? ».Il faut savoir qu’à l’époque, on avait l’habitude de semer dans une terre qui était restée en friche durant tout l’été et qui, naturellement, avait été traversée par les bergers, les troupeaux et autres. Après la semence, et pas avant, on labourait pour enterrer la semence dans la terre. L’agriculteur ensemençait donc toute le terrain dont il disposait sans savoir si c’était un sol fertile. Ceci justifie le fait que la semence pouvait tomber dans des terrains peu profonds où pouvaient naître des ronces et des épines. Mais en quelque part, le bon terrain donnerait le fruit espéré. Observons maintenant la progression à l’intérieur de la parabole. Il y a quatre moments : les trois premiers correspondent aux trois étapes du développement de la semence qui tombe d’abord dans la terre (v. 4), ensuite, elle germe (v. 5-6), puis, elle croît (v.7). Le quatrième marque la maturation ou le fruit (v. 8). Dans les trois premiers moments, il y a différentes difficultés : oiseaux, pierres, épines) qui compromettent la semence. Dans le quatrième, au contraire, tout est heureusement surmonté. Qu’est-ce que Jésus veut dire avec cette parabole? Sa prédication a rencontré des difficultés et des obstacles mais pour plusieurs qui l’ont suivi, les espérances sont devenues de plus en plus frêles. Ce que Jésus promet ne semble pas se réaliser. Alors, il importe d’espérer. À la fin, le Royaume de Dieu se présentera pleinement et tous reconnaîtront la vérité de l’enseignement évangélique. Avec l’espérance qui ne déçoit pas, que le disciple ait aussi la foi et qu’il sache attendre patiemment.

«Pourquoi parles-tu en paraboles?»

Les disciples interrogent le Maître sur le sens de son discours en paraboles. Voilà le point! Quel est le but du langage parabolique de Jésus? Si nous lisons les différentes paraboles, nous remarquons une donnée : toutes nous invitent à un effort de compréhension de la réalité et du message évangélique du Royaume de Dieu. Les paraboles sollicitent donc l’intelligence pour comprendre le Royaume de Dieu, comme nous disions, mais Jésus aussi, son mystère de passion et de glorification. Jésus exhorte souvent ses disciples à comprendre et il leur reproche souvent leur dureté de cœur (cf. Mt 15,16). En Matthieu 13,9, Jésus affirme : celui qui a des oreilles, qu’il écoute, c.-à-d. entende, comprenne bien. L’acte de foi n’est donc pas seulement un abandon confiant, presqu’aveugle et sans questionnement; il implique aussi la recherche rationnelle. Augustin affirmait : « Quiconque croit, pense, et en pensant, il croit. Si elle n’est pas pensée, la foi n’est rien » (De praedestinatione sanctorum, 2,5).

«Vous donc, écoutez»

Quand Jésus explique la parabole du semeur aux disciples, il opère un changement important : il déplace l’attention de Dieu (comme il était dans l’image du semeur) vers l’homme (aux différents terrains qui accueillent la semence). Nous pouvons aussi dire que de la foi, il passe à l’engagement moral. Attention, cependant! Ces deux moments ne sont pas opposés. Ils sont distincts, oui, mais pas divergents. Lorsque le disciple de l’Évangile se met à l’écoute de la parole de Dieu, il en est éclairé. Puis, en vertu de cette lumière, il peut avancer dans la vie en agissant et en annonçant le Royaume de Dieu. Mais le disciple sait très bien que l’écoute de la parole de Dieu n’est pas simple. Le malin peut détourner le cœur humain et le rendre stérile. Non seulement. Les différentes épreuves de la vie peuvent être un obstacle sérieux à ce que la Parole puisse s’enraciner en profondeur. Les préoccupations et surtout les richesses étouffent le développement de la Parole. Mais il y a une bonne terre où il y a toujours quelqu’un qui écoute et vit en portant du fruit à raison de trente, ou soixante, ou cent pour un. C’est le souhait de Jésus.

Alexandre C. osb

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