Ce qui lie les trois principaux protagonistes de ce dimanche (Jérémie, Paul et Jésus), c’est le thème du don total de la vie à Dieu et à son dessein de salut. Jérémie, le prophète séduit par le Très-Haut, a expérimenté combien son ministère a été objet d’opprobre et de dérision. La tentation de tout laisser est donc forte et impérieuse. Mais comment «se soustraire» au feu divin qui envahit tout son être? Paul, au contraire, exhorte les chrétiens de Rome à offrir leur corps en sacrifice vivant. Pour faire de sa propre existence une offrande, il faut donc réagir à l’inertie du siècle présent et toujours rechercher ce qui est bon, agréable et parfait aux yeux de Dieu. Finalement, après avoir annoncé sa passion-mort-résurrection imminente, Jésus invite à prendre sa croix et à le suivre. Suivre Jésus implique un renversement de la logique humaine; en un mot, il importe de penser selon Dieu et non selon les hommes.

«Mais il y avait dans mon cœur comme un feu dévorant»

La première lecture fait partie de la cinquième confession de Jérémie. La crise du Prophète atteint son sommet. Jérémie est en prison, éprouvé, torturé, précipité dans un gouffre sans aucun rayon de lumière. Alors, il pense au jour de jadis où il a été appelé, affirmant que, à cette occasion, Dieu l’a séduit. Ce verbe “séduire” ne doit pas nous tromper. C’est comme si Jérémie disait : Tu m’as pris, ô Dieu, quand j’étais encore jeune, et tu m’as séduit avec tes envies d’actualiser tes desseins. Tu as été vil à mon égard, m’utilisant pour atteindre tes buts dont je pais maintenant le prix et la honte. Jérémie veut alors se soustraire à son devoir en se retirant dans une vie privée. C’est aussi parce que personne ne veut écouter la voix de Dieu et se convertir. Et ici, le drame intérieur s’engage parce que, d’une part, il veut quitter sa charge, de l’autre, il sent que la parole de Dieu est en lui comme un feu dévorant qui brûle sa liberté et son indépendance. Le Seigneur ne répond pas à Jérémie. Pourquoi? Un vers éclairant de Hölderlin vient à l’esprit : « Dieu façonne l’homme, comme la mer, les continents : en se retirant ».

«Laissez-vous transformer»

Paul exhorte les chrétiens à offrir leur personne (corps) en sacrifice vivant, saint et agréable à Dieu. Les chrétiens appartiennent déjà à Dieu par droit de création et de rédemption mais ils doivent lui appartenir aussi sur la base d’un libre don d’eux-mêmes. Mais cela n’est ni simple ni immédiat parce qu’ils vivent dans le monde qui a ses convictions et qui poursuit ses standards de valeurs. La faiblesse et la fatigue de même que le combat sont cependant soutenus par l’action de l’Esprit Saint. C’est l’Esprit qui transforme intérieurement les croyants en les conformant de plus en plus au Christ, en faisant d’eux des hommes et femmes évangéliques. L’Apôtre affirme qu’il faut s’abandonner à son action secrète mais efficace afin que la vie soit de plus en plus une claire manifestation de l’ordre divin que le Christ a déjà inauguré.

«Si quelqu’un veut marcher derrière moi»

Dimanche dernier, nous avons entendu résonner la solennelle profession de Pierre et l’éloge de Jésus; dans la péricope d’aujourd’hui, Pierre fait d’abord des reproches à Jésus après qu’il a annoncé sa passion et mort; puis, à son tour, Jésus l’apostrophe : «satan» (obstacle). Pourquoi? Parce que le disciple considère que les voies de Dieu sont désastreuses tandis que celles du monde sont efficaces. Ainsi voyons-nous chez Pierre le double visage du disciple qui, d’une part, reconnaît la messianité du Maître, mais qui, de l’autre, réagit négativement devant la croix. C’est un fait, mais à chacune des trois annonces de la passion, les disciples manifestent toujours une incompréhension totale et un refus catégorique. Cependant, Jésus ne faillit pas, et il accomplit le don de soi à Dieu et aux frères. Que Jésus annonce sa passion et mort n’est pas un hasard; le don de soi, comme Jésus l’entend, passe à travers une mort. Une mort qui atteste comment chaque don authentique implique la vie. Non seulement. Jésus a conscience d’accomplir le dessein du Père. Qu’est-ce que ça signifie? Que tout don total de soi est salvifique dans la mesure où il accomplit la volonté de Dieu. Mais ce n’est pas encore tout. Se donner signifie prendre sa croix (v. 24). Comme nous l’avons dit plusieurs fois, nous savons que la croix exprime deux choses : l’obéissance à Dieu et la solidarité envers les frères. De plus, il faut s’approprier une logique paradoxale, d’emblée, et bien exprimée dans le parallélisme perdre-sauver. C’est la logique pascale qui nous fait comprendre une chose importante et souvent peu mise en évidence : le renoncement à soi-même n’est pas une fin en soi, tout comme le don de soi ne l’est pas, mais tout est orienté vers le trésor du Royaume (cf. 13,44). Certes, la proposition de Jésus est haute et radicale et elle en appelle à la liberté de la personne («Si quelqu’un»). Toutefois, personne n’est obligée. Le choix du Christ et de son Évangile vit dans l’espace de la liberté. Pour réaliser sa proposition, Jésus appelle à sa suite «veut marcher derrière moi»). La suite de Jésus nous fait comprendre combien sa proposition est devant nous. Nous y parviendrons dans la mesure où nous le suivrons. L’Évangile vécu n’est pas une conquête ascétique mais un don de grâce que chacun accueille et porte graduellement à son accomplissement.

Alexandre C. osb

Jésus, je te suivrai...



Paroles :

Dans la joie quand le soleil m'inonde
Sur les monts où ta présence abonde
Jésus je te suivrai

Dans la peine quand mon âme sombre
Dans la vallée du deuil et de l'ombre
Jésus je te suivrai

Pré-refrain
Car tu es mort pour moi
Je vivrai pour toi

Refrain
Tu t'es offret sans rien garder
Tu as souffert pour me sauver
Jésus je te suivrai

Je t'aimerai plus que la vie
Te servirai malgré le prix
Jésus je te suivrai

Confiant quand ma foi est profonde
Dans le doute quand ma paix semble fondre
Jésus je te suivrai

Pont
WOHOHO OHOHOHOH
WOHOHO OHOHOHOH
Jésus je te suivrai